Sous les lampadaires : retour sur une sortie terrain autour de l’éclairage nocturne

Cet événement fait partie de la programmation "Jour sur la Nuit", l'exposition temporaire de la Galerie Eurêka autour de la Nuit qui a débuté le 20 septembre 2025 et qui sera disponible jusqu'au 29 août 2026. Cette plongée dans la nuit ne s’arrête pas aux portes de l’exposition, elle devient le fil conducteur de toute une programmation culturelle de la Ville. Pour l’occasion, l’ensemble des services et équipements culturels municipaux ainsi que de nombreux partenaires se sont mobilisés pour proposer, autour de cette thématique riche et transversale, événements, spectacles, conférences, projections, ateliers ou encore sorties nocturnes.

Un diagnostic fondateur sur la Leysse

Il y a trois ans, la Ville a accompagné un diagnostic complet des éclairages impactant pour la Leysse, financé par l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse. Ce travail, réalisé en collaboration avec l'association France Nature Environnement (FNE) Savoie, a permis d’identifier les zones les plus sensibles — du Bout du Monde jusqu’au lac du Bourget — et de proposer des adaptations concrètes aux pratiques d’éclairage.

L’objectif : réduire la pollution lumineuse sur les milieux aquatiques, déjà fragilisés, conformément à l’arrêté ministériel de 2018 qui interdit l’éclairage direct de ces milieux.

L'éclairage direct des milieux aquatiques, milieux déjà très fragilisés, est interdit par l'arrêté de 2018 relatif aux nuisances lumineuses. Ce qui est très difficile à réaliser sur le terrain. Mais on peut limiter au minimum l'impact.

Agnès Biau, Chargée du Projet Régional d'Action Biodiversité - Sobriété lumineuse, à FNE Savoie.

Les cours d’eau sont particulièrement ciblés car ils constituent des corridors écologiques majeurs, où circulent poissons, insectes aquatiques, amphibiens, oiseaux et mammifères. Par exemple : des castors et des chauves-souris utilisent la Leysse pour se déplacer ou chasser la nuit. Cette observation a été montré dans le cadre de l'Atlas de la Biodiversité Communale (ABC). La lumière artificielle y provoque des perturbations très fortes : elle attire ou repousse les espèces, désoriente les poissons, bloque les déplacements nocturnes et modifie les cycles de reproduction. Elle fragmente aussi les habitats en créant de véritables barrières lumineuses. Protéger l’obscurité autour de la Leysse est donc essentiel pour préserver la continuité écologique et assurer le bon fonctionnement de tout l’écosystème aquatique.

Des actions concrètes pour un éclairage plus respectueux

À la suite de ce diagnostic, les choix techniques de la Ville en matière de rénovation de l’éclairage public (environ 500 lampadaires remplacés chaque année) ont été revus.

Plusieurs leviers ont été mis en œuvre :

• Des températures de couleur plus chaudes, de 1 700 K à 2 200 K selon les zones. Plus la température est basse, plus la lumière tire vers l’orange, et moins elle contient de lumière bleue, la plus nocive pour la faune, la flore et la santé humaine. En effet, les LED classiques, très blanches, émettent une lumière riche en bleu qui perturbent les espèces nocturnes : insectes attirés et désorientés, chauves-souris gênées dans leur chasse, poissons et amphibiens dont les cycles biologiques sont déréglés. En choisissant des lumières plus chaudes, on limite presque totalement cette lumière bleue. Elle préserve les déplacements, la reproduction et l’activité nocturne du vivant, améliore la qualité du sommeil humain, réduit l’éblouissement et permet de retrouver une nuit plus naturelle.

Ainsi, la Ville a choisi :

• 2 200 K sur la voirie ;
• 1 800 K dans les parcs et le long des cours d’eau ;
• et des essais à 1 700 K, une première sur le territoire ;
• l’installation de "stops-flux", de petites plaques adaptables aux modules LED, qui limitent la diffusion de la lumière vers l’arrière et réduisent l’éblouissement ou l’éclairage parasite ;
• la suppression d’environ 50 projecteurs installés dans des fosses et orientés vers des arbres monumentaux (Verney, Clos Savoiroux…). Ces éclairages mettaient en valeur le patrimoine végétal, mais représentaient une nuisance importante pour les espèces nocturnes.

Extinction nocturne : sobriété et adaptation

Depuis 2022, la Ville de Chambéry a mis en place l’extinction de l’éclairage public de minuit à 5h sur l’ensemble du territoire.
Cette mesure, à la fois écologique et économique, a nécessité un important travail d’adaptation mené conjointement par la municipalité et le service Voirie et Électricité. Il s’agissait de concilier sobriété énergétique, respect de la biodiversité et besoins spécifiques des usagers (services de sécurité, commerces de nuit, étudiants…).

Pour répondre à ces enjeux, la Ville a mis en place un corridor lumineux : un itinéraire balisé et maintenu allumé plus longtemps, permettant de relier les lieux d’activité nocturne (centre-ville, parkings, sites étudiants). Le reste de la commune s’éteint à minuit.

Le corridor reste allumé jusqu’à 1h30 ou 3h, selon les besoins. Certaines zones (Covet, Curial) ont également été réadaptées pour garantir la sécurité et la fréquentation des espaces publics.

Entre les nouvelles normes, obligations et sobriété énergétique, nous essayons au Service Voirie-Electricité, de trouver les meilleures solutions permettant à chacun d'y trouver son compte.

Yoan Beurre, responsable du service Voirie/ Electricité

La Ville a également cessé l'éclairage des arbres remarquables.

Une démarche globale et évolutive

Entre les nouvelles réglementations, les obligations énergétiques et la volonté de préserver la biodiversité, le service Voirie/Électricité et la municipalité travaillent en permanence à trouver le meilleur équilibre. Cette approche s’appuie sur une logique de progrès continu : tester, ajuster, améliorer. Elle s’inscrit pleinement dans la stratégie de transition écologique de la Ville, labellisée Climat-Air-Énergie 3 étoiles, et dans la démarche de sensibilisation plus large menée à travers des événements et exposition comme "Jour sur la Nuit".

Voir la nuit autrement

Moins de lumière, c’est plus de vie. La réduction de l’éclairage nocturne permet non seulement de préserver la biodiversité et de retrouver le ciel étoilé, mais aussi de réduire la consommation d’énergie et de mieux comprendre notre environnement nocturne. La Ville de Chambéry poursuit ainsi son engagement pour un cadre de vie apaisé, durable et attentif à l’équilibre entre usages humains et respect du vivant.

Une nouvelle balade commentée "sous les lampadaires" aura lieu mardi 25 novembre à 17h30. Elle est gratuite mais l'inscription est obligatoire.

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